EL HANBALI Aziz
Le tribunal de première instance à Rabat a condamné, mercredi 3 septembre 2025, l’activiste féministe Ibtissam (Betty) Lachgar à deux ans et demi de prison ferme et 50 000 dirhams d’amende. Le dossier porte sur une photo diffusée en ligne où elle apparaît avec un tee-shirt comportant des messages jugés offensants envers l’islam ; le parquet avait poursuivi au titre des dispositions du code pénal réprimant l’atteinte à la religion. La défense a immédiatement annoncé son intention de faire appel.
Âgée de 50 ans et cofondatrice du Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (MALI), Lachgar était détenue depuis son interpellation en août 2025. Ses avocats indiquent qu’elle a été maintenue à l’isolement à la prison d’El Arjat près de Rabat et soulignent la gravité de son état de santé, plaidant en vain pour une remise en liberté provisoire avant le verdict.
Au fond, la défense a soutenu que le visuel du tee-shirt relevait d’une action militante et d’une opinion politique protégée par la liberté d’expression, et non d’une intention d’outrage au culte. Le tribunal a néanmoins retenu l’infraction « d’atteinte à l’islam », assortissant la peine d’une amende (MAD 50 000). Plusieurs médias ayant couvert l’audience ont confirmé la durée de 30 mois.
Le jugement a suscité de vives réactions. Des organisations de défense des droits humains y voient un précédent inquiétant pour la liberté d’expression et la protection des libertés individuelles au Maroc, tandis que d’autres voix estiment que l’activiste a franchi une « ligne rouge » en matière de respect du religieux. Des dépêches internationales ont également fait état de l’émoi suscité par l’affaire.
Sur le plan juridique, l’affaire ravive le débat récurrent autour des textes pénaux encadrant les « atteintes à la religion ». Ces dispositions permettent des peines de prison et des amendes lorsque l’infraction est commise publiquement, notamment via les réseaux sociaux. Les commentateurs rappellent qu’elles coexistent avec des garanties constitutionnelles de liberté d’opinion, engendrant une zone de tension interprétative que met en lumière ce verdict. (Analyse déduite des sources citées.)
La prochaine étape se jouera devant la cour d’appel, où l’équipe de défense compte contester à la fois la qualification pénale et la sévérité de la sanction, en invoquant l’état de santé de la prévenue et la protection de l’expression militante. D’ici là, le cas Lachgar continuera d’alimenter un débat de société sur l’équilibre entre libertés publiques, sensibilité religieuse et ordre public dans le Royaume.